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[PROCÉDURE PÉNALE] LES DROITS ET GARANTIES PROCÉDURALES DE LA PERSONNE CONCERNÉE PAR UNE MESURE DE SAISIE PÉNALE OU DE CONFISCATION.

Les 5 et 6 février 2024, un colloque consacré à la lutte contre le blanchiment s’est déroulé au Musée océanographique de Monaco. À cette occasion, il a été précisé que pour l’année 2023 Monaco affiche 49 décisions de saisie concernant des affaires de blanchiment et 17 demandes de mainlevée entre septembre 2023 et décembre 2024, dont plusieurs sont diligentées par le cabinet.

Cette mise en lumière nous permet de préciser les droits et garanties procédurales de la personne concernée par une mesure de saisie pénale ou une décision de confiscation :

  • La saisie pénale est une mesure provisoire intervenant en cours de procédure entraînant l’indisponibilité temporaire d’un bien.
  • La confiscation est une peine prononcée à l’occasion d’une condamnation qui, lorsqu’elle devient définitive, entraîne la dépossession permanente d’un bien et son transfert au profit de l’État monégasque.

Les droits des personnes concernées par ces procédures ont été renforcés par :

  • La loi n° 1.535 du 9 décembre 2022 relative à la saisie et à la confiscation des instruments et des produits du crime, entrée en vigueur le 17 décembre 2022.
  • La loi n° 1.553 du 7 décembre 2023 portant adaptation de dispositions législatives en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive (Partie III), entrée en vigueur le 1er janvier 2024.

Quels sont-ils ?

Domaine matériel élargi de la saisie.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 1.535 du 9 décembre 2022, le domaine matériel de la saisie aux fins de confiscation a été étendu à et ne concerne plus seulement le blanchiment, la corruption ou le trafic d’influence.

Les droits des personnes concernées par une saisie de biens susceptibles de confiscation ont été densifiés.

Les notifications de la décision de saisie

  • Obligation de notification de la décision motivée de saisie du juge d’instruction ou de la juridiction de jugement aux parties intéressées et au Procureur général (avec mention du droit de toute personne concernée par une saisie à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat).
  • Obligation de signification (par voie d’huissier) de la décision motivée de saisie du juge d’instruction ou de la juridiction de jugement aux propriétaires ainsi qu’aux tiers ayant ou revendiquant avoir des droits sur le bien s’ils sont connus (avec mention du droit de toute personne concernée par une saisie à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat).

Notification dans le cadre de la saisie d’un bien au stade de l’enquête préliminaire ou de fragrance.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 1.553 du 7 décembre 2023, le Procureur général peut ordonner la saisie provisoire des biens susceptibles de confiscation. À peine de nullité de la saisie, le juge des libertés, saisi par requête du Procureur général dans un délai de 15 jours à compter de la mesure de saisie, se prononce par ordonnance motivée sur le maintien ou la mainlevée de la saisie dans un délai de 5 jours à compter de la requête. Le juge des libertés peut entendre la personne qui fait l’objet de la mesure de saisie. L’ordonnance motivée est notifiée au propriétaire du bien ou du droit saisi et, s’ils sont connus, aux tiers ayant des droits sur les objets saisis. Elle peut être déférée à la Chambre du conseil de la Cour d’appel.

Les prérogatives du propriétaire du bien saisi dans la désignation du gardien judiciaire

Le gardien judiciaire est une création de la loi 1.553 du 7 décembre 2023. Il peut être désigné :

  • Lorsqu’un bien corporel présente des difficultés matérielles pour être saisi ou conservé dans des conditions conformes à sa nature.
  • (Ou) Lorsque le propriétaire en fait la demande.

Le gardien judiciaire est responsable de la possession du bien placé sous scellé, de sa conservation ou de son usage pour toute la durée de la saisie et au plus tard jusqu’à l’issue de l’exécution de la décision de confiscation. Les frais de conservation du bien incombent au gardien judiciaire lorsqu’il est désigné sur demande du propriétaire.

Le droit de faire appel

L’appel de la décision de saisie peut être interjeté dans les 10 jours de sa notification ou de sa signification. L’appel n’a pas d’effet suspensif.

Les tiers à la procédure peuvent prétendre à la mise à disposition des pièces des procédures relatives à la saisie dont ils font l’objet.

S’ils ne sont pas appelants, le propriétaire du bien et les tiers peuvent néanmoins être entendus à la demande des parties par la Chambre du conseil, sans toutefois pouvoir prétendre à la mise à disposition de la procédure.

Le droit de former tierce opposition

Lorsque, en fonction de la date de délivrance de la signification, la personne concernée par l’acte n’a pas été en mesure, à raison de circonstances indépendantes de sa volonté de faire valoir ses droits au cours de l’un des quelconques des stades de la procédure ou des degrés de juridiction du fond, elle peut former tierce opposition.

Le droit de solliciter la mainlevée de la saisie

La décision de saisie reste en vigueur le temps nécessaire pour préserver les biens en vue de leur éventuelle confiscation ultérieure. La mainlevée partielle ou totale de la mesure peut être décidée d’office ou à la demande de toute personne démontrant y avoir intérêt et spécialement quant au maintien de la valeur du bien.

L’absence de décision de confiscation définitive ultérieure emporte de plein droit la mainlevée des mesures de saisie ordonnées et leur restitution.

Le droit à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat

Les personnes concernées par une décision de confiscation peuvent être assistées d’un avocat-défenseur ou d’un avocat durant toute la procédure et, lorsqu’elles sont connues, sont informées de ce droit.

Le droit de faire appel

En matière correctionnelle, les tiers concernés par une mesure de confiscation peuvent faire appel du jugement prononçant la peine de confiscation. À cette fin, le Code de procédure pénale prévoit la signification du jugement correctionnel à toutes les personnes concernées avec mention de leur droit à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat.

En matière criminelle, les tiers concernés par une mesure de confiscation peuvent faire appel devant la Chambre du conseil du jugement. La décision qui prononce la mesure de confiscation est signifiée à toute personne concernée. Ici encore, la signification comprend mention du droit de toute personne concernée à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat.

Les droits des copropriétaires de bonne foi

Lorsque la peine de confiscation porte sur des biens sur lesquels toute personne autre que le condamné dispose d’un droit de propriété, elle ne peut être prononcée si cette personne dont le titre est connu ou qui a réclamé cette qualité au cours de la procédure n’a pas été mise en mesure de présenter ses observations sur la mesure de confiscation envisagée par la juridiction de jugement aux fins, notamment, de faire valoir le droit qu’elle revendique et sa bonne foi.

La personne dont le titre n’était pas connu ou qui n’a pas réclamé cette qualité au cours de la procédure peut former tierce opposition.

La gestion des biens saisis et confisqués est confiée à un organe ad hoc : le Service de gestion des avoirs saisis ou confisqués créé par la loi n° 1.535 du 9 décembre 2022.

Sur ce service, cf. :

  • Ordonnance Souveraine n° 10.245 du 7 décembre 2023 portant application du Chapitre II de la loi n° 1.535 du 9 décembre 2022 relative à la confiscation des instruments et des produits du crime (organisation et exercice des missions du Service de gestion des avoirs saisis ou confisqués).
  • Ordonnance Souveraine n° 10. 246 du 7 décembre 2023 portant modification de l’Ordonnance Souveraine n° 6.317 du 20 mars 2017 portant création de l’Administration des Domaines (mise en œuvre de la procédure d’aliénation des biens saisis ou confisqués).
  • Ordonnance Souveraine n° 10.247 du 7 décembre 2023 portant nomination du Directeur du service, Monsieur Richard DUBANT, jusqu’au 31 août 2025.

Le droit à restitution

Décision définitive.

Lorsqu’est devenue définitive une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement ou une décision de condamnation n’ayant pas prononcé la peine de confiscation :

  • Le Procureur général informe le propriétaire du bien, par lettre avec demande d’avis de réception, de son droit à restitution du bien ou produit de la vente, ainsi que des modalités de restitution. Si la restitution n’est pas demandée dans un délai de 12 mois, les biens non restitués deviennent propriété de l’État, sous réserve des droits des tiers.
  • Le propriétaire peut demander que lui soit restitué le produit de l’aliénation des biens saisis par le Service de gestion des avoirs.

Absence de décision quant au bien saisi.

Lorsqu’aucune information judiciaire n’a été ouverte ou lorsqu’aucune juridiction de jugement n’a été saisie ou n’a pu être saisie en raison du décès de l’auteur, ou lorsque la juridiction de jugement saisie, ou le juge d’instruction, a définitivement épuisé sa compétence sans avoir statué sur un bien saisi, le Procureur Général est compétent pour décider, d’office ou sur requête de sa restitution.

La décision de non-restitution du Procureur général peut être déférée par l’intéressé ou ses ayants droit devant la Chambre du Conseil de la Cour d’appel, dans le délai d’un mois suivant sa signification, par déclaration au greffe ou par lettre LRAR adressée au greffe de ladite chambre. Ce recours est suspensif.

Le droit de faire appel

Le juge d’instruction peut :

  • Ordonner au Service de gestion des avoirs la remise des biens saisis aux fins de conservation et de valorisation desdits biens.
  • Autoriser, sous conditions, l’aliénation des biens saisis ou leur destruction (pour les seuls biens meubles).

Toute décision prise dans ce cadre légal (articles 268-11 et 268-12 du Code de procédure pénale) fait l’objet d’une ordonnance motivée du juge d’instruction. Cette ordonnance est notifiée au Procureur général, aux parties intéressées et, s’ils sont connus, aux propriétaires ainsi qu’aux tiers ayant des droits sur le bien qui peuvent la déférer à la Chambre du conseil.

L’appel des décisions prises pour l’administration des biens saisis ou confisqués (conservation ou valorisation) n’a pas d’effet suspensif.

L’appel des décisions prises pour l’aliénation ou la destruction des biens saisis ou confisqués a un effet suspensif.

Les équipes de ZABALDANO Avocats sont à votre disposition pour répondre à l’ensemble de vos interrogations.

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