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[CONTENTIEUX SOCIAL] Cour européenne des droits de l’Homme, 5 octobre 2023, Perez c Monaco.

Validité du refus des juridictions monégasques d’ordonner la communication de documents détenus par l’employeur de la requérante.

ZABALDANO Avocats est intervenu dans la défense des intérêts de l’employeur devant juridictions monégasques.

En janvier 2014, la requérante est désignée présidente administratrice déléguée d’une société monégasque. En novembre 2014, l’assemblée générale extraordinaire de la société la révoque.

En octobre 2015, la requérante saisit le tribunal de première instance de Monaco qui, par un jugement de décembre 2017, condamne la société monégasque l’ayant révoquée à lui payer une somme en remboursement de frais professionnels, mais rejette les autres demandes (paiement de commissions et rémunérations complémentaires). La requérante interjette appel.

Par un arrêt de septembre 2020, la cour d’appel de Monaco confirme le jugement. Elle annule le remboursement de frais professionnels relevant que la requérante avait bénéficié de l’usage d’une carte professionnelle. Elle considère que les autres documents produits à l’appui des demandes de rémunérations complémentaires ne sont pas suffisamment probants.

Par un arrêt de juin 2021, la Cour de révision considère que la Cour d’appel, par des motifs propres et adaptés, a souverainement estimé que la requérante ne pouvait prétendre à des rémunérations complémentaires.

Parallèlement, la requérante sollicite la communication de documents détenus par la société monégasque et des tiers pour faire valoir le paiement de rémunérations complémentaires. Elle se voit opposer un refus constant des juridictions monégasques.

Requête aux fins de compulsoire

Nombreuses sont les hypothèses où une partie n’a pas accès à l’information. La requête aux fins de compulsoire est une procédure permettant d’obtenir des éléments de preuve utiles à tout procès de manière non contradictoire.

En l’espèce, la requérante la mobilise pour obtenir la désignation d’un huissier de justice pour se rendre dans les locaux de divers organismes afin de se faire remettre divers documents.

La requête est rejetée par la présidente du tribunal de première instance en avril 2018 puis par la cour d’appel en juin 2018, aux motifs que la juridiction de fond était déjà saisie du litige et que les exigences du procès équitable faisaient obstacle à l’engagement d’une procédure non contradictoire.

Requête avant dire droit

Dans le cadre de la procédure au fond, la requérante forme une demande, avant dire droit, de communication de l’ensemble des documents conservés par la société.

En janvier 2019, la cour d’appel de Monaco rejette l’exception de communication aux motifs que la requérante ne justifie pas de l’utilité des pièces demandées au regard de ses demandes au fond et qu’une telle communication présente un risque d’atteinte aux droits des tiers. En juin 2021, la Cour de révision considère légalement justifiée la position de la Cour d’appel.

 

La requête concerne l’équité de la procédure conduite devant les juridictions internes monégasques. La requérante se plaint :

  • d’un défaut d’accès à un tribunal et d’une atteinte à son droit à un procès équitable, alléguant n’avoir pu obtenir les éléments nécessaires à sa demande de paiement de commissions et de rémunérations complémentaires.
  • (et) de la durée excessive de la procédure.

La durée excessive de la procédure

Conformément à l’article 35 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (ci-après “Conv EDH”), la Cour ne peut être saisie qu’après épuisement des voies de recours internes.

Or, en l’espèce, elle constate que l’article 4 bis du Code civil monégasque prévoit expressément une action en responsabilité de la puissance publique à raison du fonctionnement défectueux de la justice, notamment en cas de durée excessive de la procédure civile. La requérante n’a pas exercé au préalable un tel recours. Elle n’a donc pas épuisé les voies de recours internes au sens de l’article 35 § 1 de la Conv. EDH.

Le refus des juridictions internes d’ordonner la communication de pièces

Pour la procédure de compulsoire, le refus des juridictions est motivé par la nécessité de respecter la loyauté des débats de la partie défenderesse. Il n’est ni arbitraire ni déraisonnable.

Pour la procédure au fond, la Cour constate que la requérante a bénéficié d’un procès contradictoire et que l’ensemble des moyens de la requérante ont été dûment examinés par les juges internes.

La Cour observe également que la Cour de révision a par la suite effectué un contrôle de la motivation du caractère proportionné du refus d’ordonner la communication des pièces.

La Cour en déduit qu’il n’y a aucune apparence de violation du droit à un procès équitable et du droit d’accès à un tribunal, garantis respectivement par les articles 6 § 1 et 13 de la Conv. EDH.

 

Les équipes de Zabaldano Avocats restent à votre disposition pour répondre à l’ensemble de vos interrogations.

 

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