En vertu de la loi n° 1.144 du 26 juillet 1991, l’exercice d’activités économiques indépendantes à Monaco est soumis à autorisation préalable. Cette autorisation peut être suspendue ou révoquée notamment :
– lorsque l’activité n’a pas été exercée pendant plus de six mois sans justification légitime ;
– ou encore lorsque l’exploitant contrevient à ses obligations légales, notamment celles relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB/FT/CO/PDAM).
En l’espèce, les requérants étaient autorisés depuis 2015 à exploiter une activité de bâtiment tous corps d’état au sein de la SARL AA.
Or, la société n’avait déclaré aucun chiffre d’affaires depuis septembre 2019.
De plus, elle n’avait pas respecté l’obligation de déclaration des bénéficiaires effectifs pendant une période de cinq ans, en violation des dispositions de la loi n° 1.362 du 3 août 2009 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive et la corruption.
Les époux H faisaient valoir deux types de griefs :
– Un vice de procédure, au motif qu’ils n’auraient pas été régulièrement convoqués devant la commission compétente prévue par l’article 10 de la loi de 1991. Selon eux, la convocation n’aurait pas été reçue en temps utile, ce qui aurait empêché toute présentation de leurs observations. Ils invoquaient ainsi une atteinte à leurs droits de la défense et au principe du contradictoire, tel que garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
– Une illégalité de fond, en ce que l’inactivité de la société serait imputable à un « sommeil économique » justifié par la conjoncture. Quant au manquement relatif aux bénéficiaires effectifs, les requérants soulignaient que la régularisation était intervenue avant la décision contestée.
Le Ministre d’État soutenait pour sa part que la procédure avait été strictement respectée : la convocation avait bien été notifiée à l’adresse du siège social de la société, signée par un préposé habilité à recevoir les plis. En outre, le courrier précisait clairement les motifs de la convocation et offrait aux intéressés la possibilité de présenter leurs observations ou de se faire assister.
Sur le fond, l’administration considérait que les deux manquements étaient avérés et fondé :
– l’inactivité économique n’était justifiée par aucun élément tangible,
– le défaut de déclaration des bénéficiaires effectifs avait persisté pendant cinq ans, malgré l’existence d’une obligation continue et connue des professionnels.
Le Tribunal Suprême rejette l’ensemble des arguments des requérants.
D’une part, il considère que la procédure a été régulière : la convocation à la commission a bien été remise contre signature à l’adresse professionnelle. Peu importe que les intéressés aient pris connaissance tardivement du courrier : cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la notification.
D’autre part, sur le fond, le Tribunal constate que :
– La SARL n’avait exercé aucune activité économique depuis 2019, sans qu’aucun motif légitime ne soit avancé pour justifier cette inactivité prolongée.
– Les bénéficiaires effectifs n’ont été déclarés qu’en décembre 2023, soit tardivement et après cinq années de manquement aux obligations de transparence.
Le Tribunal conclut que les conditions légales posées aux points 3° et 7° de l’article 9 de la loi n° 1.144 étaient réunies, justifiant ainsi la privation d’effets de l’autorisation d’exercer. La requête est rejetée, et les dépens mis à la charge des requérants.